Stabat Mater
Alors que sa renommée est grandissante, le jeune Antonín Dvořák — il a trente-quatre ans— subit entre 1875 et 1877 une terrible tragédie familiale : c’est d’abord sa fille nouveau-née, Josefa, qui décède brusquement. Puis, à peine deux ans plus tard, c’est au tour d’une autre de ses filles, Ružena, puis de son fils aîné Otakar de disparaître à quelques semaines d’intervalle. Esquissé à la suite du premier décès, le Stabat Mater est achevé dans les mois qui suivent la perte de son fils. A la lumière de ces poignants événements, on devine que ce texte liturgique prend ici une portée éminemment personnelle. Le caractère universel de ces vers, où les douleurs de la Vierge Marie sur le cadavre de son fils et la compassion de chrétiens se transcendent en un message à caractère eschatologique, se double ici de la brûlure d’une souffrance individuelle inapaisable. L’œuvre y gagne une urgence dramatique, une incandescence émotionnelle et une spontanéité déchirantes, tout en restant — et c’est la un tour de force — extraordinairement pudique. On peut dès lors comprendre que cette œuvre, constamment animée d’un sentiment naturel et d’une inspiration jaillissante, ait propulsé dès sa création en 1880 le compositeur sur le devant de la scène musicale mondiale. Entouré de solistes de la plus haute tenue — dont Renata Pokupic, l’ébouriffant Néron d’Agrippina en 2011 —, Philippe Herreweghe signe ici son grand retour à Dijon, qui ne l’avait pas entendu depuis 2005, avec une version sur instruments authentiques de cette partition bouleversante.
Orchestre des Champs-Élysées
Collegium vocale Gent
Musical director Philippe Herreweghe
Mezzo-soprano Renata Pokupic
Tenor Magnus Stavenland
Bass baritone Florian Boesch
Dvořák Stabat Mater op. 58